Dans des familles marquées par le narcissisme pathologique et ce que l’on appelle l’incestuel, se sentir invisible devient une expérience quotidienne. Ces familles, souvent dysfonctionnelles, voient les individus comme des prolongements d’eux-mêmes, incapables de reconnaître leurs besoins et leurs limites. L’incestuel, tel que défini par Racamier, désigne une dynamique familiale où les frontières émotionnelles et psychiques sont effacées, favorisant un climat propice à l’inceste, même en l’absence d’actes physiques. Ce narcissisme toxique, tel que décrit également par Marie-France Hirigoyen, repose sur la manipulation et l’effacement de l’autre, qui n’existe qu’au service des besoins du narcissique.

Apparence à part explore cet état d’effacement intérieur, où l’on n’existe pas en tant que sujet. À travers des figures évanescentes, la série donne corps à ce sentiment d’être un fantôme, mais aussi à la peur de s’exposer, aux représailles, au déni et à l’errance émotionnelle qui accompagnent les violences subies. Elle traduit le désespoir des victimes d’inceste et de violences intrafamiliales, parfois jusqu’à la pensée du suicide, dans une jeunesse marquée par l’incompréhension et le silence.

Cette série nocturne capte le paradoxe entre le besoin de se cacher pour se protéger et le désir d’être vu pour exister. Dans cet univers, ils n’ont nulle part où aller : aucune sécurité affective, aucune chaleur humaine, aucun espace où se réfugier. Le foyer, censé être un lieu de protection, devient inaccessible, et la rue, malgré ses dangers, semble offrir une sécurité relative.

Apparence à part interroge la lutte pour exister face à l’indifférence et aux apparences trompeuses. Elle éclaire les liens entre isolement, rejet et résilience, tout en appelant à reconnaître ces histoires invisibles et à leur donner une voix.

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